Le XVIIe siècle

Thursday, December 04, 2008













Jacques-Bénigne Bossuet
(1627- 1704 )


Jacques-Bénigne Bossuet, né à Dijon le 27 septembre 1627 et mort à Paris le 12 avril 1704, est un homme d'Église, prédicateur et écrivain français.

Biographie

Prélat, prédicateur et écrivain français né à Dijon en 1627, mort à Paris en 1704. Bossuet surnommé par la suite « l’Aigle de Meaux » fait ses études secondaires chez les jésuites du Collège des Godrans, ses études supérieures au Collège de Navarre et à la Sorbonne.

Il se fait une telle réputation d’orateur qu’il prêche, à quinze ans, à l’hôtel de Rambouillet. C’est très certainement grâce à saint Vincent de Paul dont il soutient l’action, qu’il deviendra sans doute l’un des plus grands prédicateurs.

Ordonné prêtre en 1652 c’est à Metz qu’il exerce son ministère jusqu’en 1659. Nommé évêque de Condom en 1669, il prononce l’Oraison funèbre de Henriette Marie de France, reine de Grande-Bretagne, puis celle d’Henriette Anne d’Angleterre, duchesse d’Orléans. Il est élu à l’Académie française en 1671.

Il privilégie de 1670 à 1681 sa fonction de précepteur du Dauphin Louis de France, fils de Louis XIV à ses activités pastorales.

C’est en 1681 que parait son fameux « Discours sur l’histoire universelle » ouvrage faisant partie des nombreux autres écrits pour son élève.

Appelé en 1681 à l’évêché de Meaux par Louis XIV , il s’implique par la suite dans le conflit qui oppose le roi et le pape Innocent XI sur le droit d’ingérence du Saint-Siège dans les affaires de la France. Il rédige la déclaration de 1682 sur les libertés de l’Église gallicane, qui fixe les limites du pouvoir spirituel des papes et du pouvoir temporel des rois. Il poursuit sa grande idée, qui est la réunion de toutes les Églises. Du reste Il entretient depuis 1690 une correspondance avec le philosophe luthérien Leibniz sur ce sujet.

En 1698 il écrit un pamphlet, « Relation sur le quiétisme », qui entraîne en 1699 la condamnation à Rome de la doctrine de Madame Guyon et des écrits de Fénelon, représentants français du quiétisme , par Innocent XII. Pour finir il porte une condamnation impitoyable et sans nuances sur le théâtre et les comédiens.

Il meurt le 12 avril 1704 alors qu’il était en pleine polémique avec avec Richard Simon à propos de l’exégèse et de la critique historique des écrits bibliques.

sa vie

Enfance et formation

Bossuet est le plus grand orateur sacré des temps modernes. Il est né à Dijon le 27 septembre 1627, mort à Paris le 12 avril 1704. Il était issu d'une famille de robe dont les membres occupaient des sièges dans les parlements de Dijon et de Metz. Il étudia chez les jésuites, qui devinèrent son génie naissant et tentèrent de l'attacher à leur compagnie. Mais sa famille, partageant peut-être les préventions parlementaires contre la société, ou jugeant qu'une nature aussi impétueuse ne pourrait prendre librement son essor sous une règle qui imposait le sacrifice de la personnalité humaine, l'arracha en quelque sorte aux sollicitations dont il était l'objet et l'envoya faire sa philosophie à Paris.

Encore enfant, la majesté de la Bible avait éveillé l'instinct de son génie. Ses maîtres le surprirent un jour inondant de ses larmes les feuillets du livre sacré, et nourrissant son âme et son esprit de cette poésie et de cette éloquence qu'il ne devait plus oublier. C'est en effet l'Ancien Testament plus que l'Évangile qui détermina dans la suite les formes de sa pensée, et il se complaisait plus tard à rappeler cette impression de son enfance et l'impulsion décisive qu'il en avait reçue. Il avait quinze ans lors de son arrivée à Paris. Le premier spectacle qui frappa ses yeux fut l'entrée du cardinal de Richelieu, porté mourant dans une litière, victorieux de ses ennemis, mais vaincu par la maladie, et traversant la capitale, dont les rues étaient tendues de chaînes, dans un appareil triomphal qui ressemblait à une pompe funèbre. Le contraste de cette magnificence et de cette misère l'émut profondément, et lui inspira pour la vanité des grandeurs humaines cette pitié dédaigneuse qu'il aime à faire contracter, dans les chefs-d'oeuvre de sa parole, avec son enthousiasme pour les grandeurs éternelles de Dieu et de la création.

Il entra au collège de Navarre ; l'étude des classiques, la fréquentation de la haute société lettrée de Paris, disciplinèrent, en le tempérant, cet esprit qui débordait de la grandeur impétueuse des livres saints. L'éclat de ses thèses attira sur lui tous les yeux, et l'hôtel de Rambouillet voulut entendre cet adolescent de génie, qui, dans un sermon improvisé, fit pressentir tous les triomphes qui l'attendaient dans la carrière de l'éloquence sacrée. "On n'a jamais prêché ni si tôt ni si tard", écrivit à ce sujet le bel esprit Voiture, faisant allusion à l'âge de l'orateur et à l'heure avancée où le sermon avait été prononcé. On rapporte qu'à cette époque, Bossuet allait quelquefois voir représenter les chefs-d'oeuvre de Corneille, autant par admiration pour la mâle poésie du grand tragique que dans le désir de se former à la déclamation. […]

Vers le triomphe

Bossuet, reçu docteur en Sorbonne et ordonné prêtre en 1652, passa quelque temps en retraite à Saint-Lazare, où l'influence évangélique de saint Vincent de Paul dut adoucir la sévérité impérieuse de son génie ; puis, résistant aux voix amies qui l'appelaient dans les chaires de Paris, et renonçant volontairement au titre de grand maître du collège de Navarre, qui lui était offert, il alla occuper un modeste canonicat à Metz, et se prépara par d'immenses travaux au rôle prépondérant qu'il était appelé à jouer dans l'histoire de l'Église au XVIIe siècle. Quelques brillants succès dans la controverse contre les protestants du diocèse de Metz, des missions et des conférences pour leur conversion, des écrits ayant le même but, occupèrent tous les instants qui n'étaient pas consacrés à l'étude des Pères de l'Église.

Appelé quelquefois à Paris pour les affaires de son chapitre, il y prêcha souvent avec un grand succès, et jeta enfin les fondements de sa haute renommée d'orateur par ses prédications du carême de 1659, aux Minimes de la place Royale. Jamais la chaire française n'avait retenti de tels accents, et l'émotion fut immense dans le public, à la cour et dans l'Église. Louis XIV appela le prédicateur pour prêcher devant lui l'Avent de 1661, et, saisi d'un élan de sympathie bien rare dans cette âme hautaine, fit écrire au père de Bossuet pour le féliciter d'avoir un tel fils. Désormais l'orateur sacré poursuivit sa carrière, marchant de triomphe en triomphe, et, pendant une période de plus de dix années, répandant des torrents d'éloquence du haut des chaires de Paris et de la cour. On n'a recueilli qu'une partie des sermons qu'il prêcha à cette époque, et qui n'ont été publiés qu'en 1772 ; beaucoup même n'ont jamais été écrits ; quelques heures avant de monter en chaire, il se livrait à une profonde méditation, jetait quelques idées sur le papier, et s'abandonnait ensuite à la puissance de son inspiration. Jamais il ne répétait le même sermon deux fois. Quand il avait à traiter les mêmes sujets, il les envisageait sous de nouveaux points de vue.

Nommé, en 1669, évêque de Condom, Bossuet se démit de ce siège (où il ne résida jamais) pour se consacrer tout entier à l'éducation du dauphin, dont le roi l'avait choisi comme précepteur en 1670. Il composa pour son royal élève le Discours sur l'histoire universelle, qu'on a justement nommé l'histoire du gouvernement de la Providence sur la terre, et qui est demeuré, avec les Oraisons funèbres, la plus populaire de ses oeuvres ; De la Connaissance de Dieu et de soi-même, application lumineuse des principes de Descartes ; et la Politique tirée des propres paroles de l'Écriture sainte, où il donne la théorie de la royauté absolue. On aperçoit le lien logique qui unit ces trois ouvrages, monuments impérissables de notre littérature, dont l'un contient la philosophie, l'autre l'histoire, et le dernier la politique. Ils formaient un ensemble qui se rattachait au plan général savamment combiné par Bossuet et Montausier pour l'éducation du jeune prince. [...]

Pour la révocation de l'Édit de Nantes

Ses controverses contre les protestants sont demeurées célèbres dans l'histoire des polémiques religieuses. On assure qu'il se fit aimer de tous ceux qu'il a combattus, et que, s'il se montra sévère contre les doctrines, il était plein de mansuétude pour la personne des réformés, et qu'il se prononça hautement contre les mesures de rigueur. […] Mais, sur la question fondamentale de l'extirpation du protestantisme, il avait l'opinion inflexible, absolue, de tout l'épiscopat, de l'Église catholique entière, la même prétention à commander aux convictions d'autrui, à punir les dissidents, à opprimer les consciences.

On connaît l'enthousiasme cruel qu'il fit éclater lors de la publication d'un édit funeste qui rappelle les temps de Décius et de Dioclétien, la révocation de l'édit de Nantes. "Publions ce miracle de nos jours," s'écrie-t-il dans l'oraison funèbre de Le Tellier ; "épanchons nos coeurs sur la piété de Louis ; poussons jusqu'au ciel nos acclamations, et disons à ce nouveau Constantin, à ce nouveau Théodose, à ce nouveau Marcien, à ce nouveau Charlemagne... vous avez affermi la foi, vous avez exterminé les hérétiques ; c'est le digne ouvrage de votre règne, c'en est le propre caractère. Par vous l'hérésie n'est plus : Dieu seul a pu faire cette merveille !" […]

Une prodigieuse activité

Malgré l'obligation où il était de séjourner à la cour, à cause de ses fonctions d'aumônier de la Dauphine, Bossuet faisait de fréquentes visites dans son diocèse, présidait des conférences d'ecclésiastiques, tenait un synode chaque année, parfois même prêchait dans sa cathédrale, et enfin, autant que sa position le lui permettait, remplissait les fonctions et les devoirs de l'épiscopat. Il avait en outre institué des missions pour les campagnes, publié des prières, un catéchisme, des instructions, etc. Et tout cela au milieu de ses grandes affaires, de ses luttes et de la composition de ses ouvrages. Sa prodigieuse activité suffisait à tout.

Attaqué d'une maladie cruelle, la pierre, il ne put se résoudre à se soumettre à l'opération de la taille, et passa les deux dernières années de sa vie dans les plus grandes souffrances. Son énergie intellectuelle ne l'avait cependant pas abandonné ; malgré ses douleurs, il s'occupa jusqu'à la fin d'études, de travaux de piété, de la révision de ses ouvrages, et enfin, quand il expira, il venait d'achever la paraphrase du psaume XXI.

Philosophe, orateur, historien, théologien, controversiste, politique, Bossuet fut le génie le plus vaste et le plus complet de son siècle, l'oracle de l'Église de France, et la plus imposante figure du christianisme dans les temps modernes. La Bruyère a même pu l'appeler un Père de l'Église sans étonner ses contemporains ni la postérité, et l'on pourrait en effet le comparer à saint Augustin pour l'ascendant et l'autorité qu'il exerça, ainsi que pour la puissante fécondité de son génie.

Critique des idées de Bossuet

Dans cette notice, nous avons envisagé ce puissant génie en nous plaçant autant que possible au point de vue de son temps, sans le discuter et sans le juger, chose qui pourrait sembler téméraire quand il s'agit d'un homme aussi grand, qui est la plus haute expression du génie catholique à la fin de l'ère ancienne, à l'aurore des temps nouveaux.

Bossuet occupe en effet, dans la monarchie de Louis XIV, la première place peut-être après le roi. Il est le centre des choses spirituelles, le régulateur suprême de toutes les affaires ecclésiastiques, la grande autorité, le chef réel des évêques de France. Depuis saint Bernard, on n'avait pas eu d'exemple d'une influence aussi prépondérante. L'illustre prélat ne la dut pas seulement à son éloquence, à son génie, a son grand caractère, mais à d'autres causes encore qu'il convient d'apprécier.

Si nous le jugeons en effet comme théologien, comme philosophe, comme politique et comme historien, nous reconnaîtrons qu'il fut l'incarnation la plus complète des idées et des doctrines de son siècle ; nul n'a plus magistralement représenté la discipline, l'autorité, la tradition, la vénération pour les puissances, tous les principes officiels du grand règne, qu'on pourrait l'accuser même d'avoir exagérés.

Sa théologie

En théologie, il est pour la rigueur dogmatique, pour les idées qui sont admises le plus anciennement et le plus généralement dans l'Église, l'adversaire inflexible de toutes les nouveautés, le jansénisme, le quiétisme, le molinisme, le quesnélisme, la réforme, etc. À l'ardeur avec laquelle il combat ces doctrines, on voit bien qu'il s'est nourri du terrorisme biblique bien plus que des tendresses de l'Évangile.

Tout changement est coupable et mauvais ; l'état immuable est le seul bien ; Dieu est l'immutabilité même. De ces idées découle nécessairement la condamnation du monde, où tout change et se renouvelle. Il n'y a pas harmonie entre le ciel et la terre, mais opposition ; on ne peut aimer à la fois Dieu et le monde, la vie présente et la vie future, etc. Son culte pour le passé, pour la tradition, le conduisait même à maintenir les croyances qui choquaient de plus en plus l'esprit moderne, telles que la magie, les apparitions, la réprobation absolue des religions antiques, et conséquemment la damnation de tous les sages et de tous les héros de l'antiquité. C'est ainsi qu'il traite Socrate, Marc-Aurèle et autres d'ennemis de Dieu (Oraison funèbre du prince de Condé).

De même, le dogme du péché originel lui fait paraître légitimes les dispositions législatives qui punissaient le père dans sa postérité : "Il n'est pas moins juste, dit-il, de punir un homme dans ses enfants que dans ses membres et dans sa personne." [...]

Un défenseur du "despotisme pur"

Il est facile d'imaginer, d'après ces principes, qui d'ailleurs sont ceux du pur catholicisme, ce que seront ses opinions touchant les choses de la terre, l'organisation des sociétés humaines. Ses théories sont telles, sur ce point, que les civilisations asiatiques devraient être regardées comme un idéal en fait de politique et de gouvernement. On n'a jamais, en effet, donné une théorie plus complète du despotisme pur, et il serait impossible d'imaginer un état social plus dégradant, plus voisin de la barbarie : le genre humain n'est plus qu'un bétail ; il n'y a plus de société, plus de citoyens, mais des troupeaux dociles, défilant sous la verge du prince, qui est nécessairement, fatalement, le représentant de Dieu sur la terre. Bien plus, les rois sont eux-mêmes des espèces de dieux sur la terre.

Écoutez plutôt :

" L'autorité royale est absolue. Le prince ne doit rendre compte à personne de ce qu'il ordonne. Les princes sont des dieux, suivant le langage de l'Écriture, et participent en quelque façon à l'indépendance divine. Contre l'autorité du prince, il ne peut y avoir de remède que dans son autorité. Il n'y a point de force coactive contre le prince... Le prince est un personnage public : tout l'État est en lui ; la volonté de tout le peuple est renfermée dans la sienne... On ne doit pas examiner comment est établie la puissance du prince : c'est assez qu'on le trouve établi et régnant... Il n'est permis de s'élever, pour quelque cause que ce soit, contre les princes... Au caractère royal est inhérente une sainteté qui ne peut être effacée par aucun crime, même chez les princes infidèles... "

II serait inutile de multiplier ces citations et de commenter de semblables théories, dont les conséquences sont assez claires, et qui sont un témoignage caractéristique du fétichisme et de la servilité du temps. Qui ne voit aussi que Bossuet, en déifiant le prince, quel qu'il soit et de quelque manière qu'il ait été établi, en le marquant d'un caractère de sainteté qu'aucun forfait ne peut effacer, n'est plus qu'un adorateur du fait brutal, de la force pure, et qu'il rétrograde ainsi par delà le moyen âge même et jusqu'aux césars byzantins. Voilà le fond de la politique qu'il dit avoir tirée de l'Écriture sainte. Évidemment, elle y avait été déposée à l'intention de Louis XIV. Il établit, il est vrai, que Dieu est au-dessus de tous les monarques ; mais c'est pour en déduire, pour ceux-ci, la nécessité de partager l'autorité avec le sacerdoce et de détruire dans leurs États les fausses religions.

Sa philosophie historique

Sa philosophie historique est tout aussi élémentaire, et, osons le dire, ne supporte pas mieux l'examen.

Transportant la théologie dans l'histoire, il ne voit que des coups d'État de la Providence dans les révolutions des empires, asservit les événements à la domination de son génie, suivant une expression de Chateaubriand, accepte des symboles et des mythes comme des faits d'histoire positive, et, par la plus étonnante des licences oratoires ou poétiques, rattache sérieusement les fastes de toutes les nations à l'histoire obscure du petit peuple juif, représenté comme le centre du monde entier. C'est pour l'instruction, pour l'édification ou le châtiment de ces tribus ignorées du monde antique que les empires croulent, que les conquérants dévastent la terre, que les peuples émigrent, que les civilisations naissent, fleurissent et meurent. Rien ne s'est passé dans l'univers que pour l'accomplissement de la parole de Dieu, pour la vérification des prophéties hébraïques.

Naturellement, Bossuet laisse en dehors de son plan les peuples que n'avaient point connus les rédacteurs des livres mosaïques, toute la haute Asie, les deux Amériques, etc., enfin des centaines de nations qui apparemment ne comptaient point aux yeux de leur créateur, puisque les docteurs ont dédaigné de leur attribuer un rôle dans le grand drame providentiel. Ces poétiques hallucinations ne sont plus à réfuter aujourd'hui, et pour les admettre il nous faudrait publier ou rejeter les notions les plus positives de la science.

Mais d'ailleurs ce n'est pas au savoir humain, à l'expérience acquise, que Bossuet fait appel pour édifier ses théories : c'est du ciel qu'il tire tous ses documents ; c'est la parole de Dieu qu'il invoque ; il ne démontre pas, il affirme. Il ne faudrait pas le juger avec les principes rigoureux des sciences humaines, qu'il méprise et qu'il domine de toute la hauteur de son inspiration. Par sa méthode, il est à dix siècles de nous, dans le monde des scolastiques, des enthousiastes et des visionnaires. C'est de la Bible qu'il tire sa chronologie, son ethnographie, son histoire primitive, comme il en a tiré sa philosophie, son éloquence et sa théologie.
Ce système de tout interpréter, de tout expliquer par les livres saints s'était tellement emparé de lui, qu'on en retrouve partout la trace ; jusque dans celles de ses oeuvres où il est appelé à traiter des sujets modernes. Et pour ne citer qu'un exemple de cette application continuelle de la théologie à l'histoire, des lois providentielles aux misères des annales humaines, n'expliquait-il pas la révolution d'Angleterre en disant que Dieu l'avait faite pour sauver l'âme de Madame.
Ces réserves faites au nom de l'esprit de notre temps, il nous semble presque superflu d'ajouter que nous n'en considérons pas moins Bossuet comme un des plus vastes génies des temps modernes. Il nous paraît même douteux que le catholicisme produise désormais un champion d'une telle puissance et qui s'élève à une si grande autorité.

( Azadunifr )

Ses oeuvres:

Les sermons:

Il en a écrit et prononcé près de 200, dont il reste la préparation qu'il développait en chaire. Le plus connu est le Sermon sur la mort (1662).

Appelé souvent à Paris, il commença à s'y faire une grande réputation pour ses sermons et ses panégyriques des saints. Il prêcha un avent et un carême devant la reine-mère et devant le roi, et opéra parmi les Protestants un grand nombre de conversions, parmi lesquelles on cite celles de Turenne, de Dangeau, de Mademoiselle de Duras. C'est pour l'aider à accomplir ces conversions qu'il rédigea son Exposition de la doctrine de l'Église. Bossuet subit plusieurs influences : celles du jésuite Claude de Lingendes, des jansénistes Saint-Cyran et Singlin, et celle plus remarquable de saint Vincent de Paul. Ce dernier tenait, à Saint-Lazare, des conférences sur la prédication, auxquelles Bossuet assista. Son éloquence en est marquée, et se fait plus proche et plus simple.

La plupart de ses discours improvisés sont perdus. Il ne nous en est parvenu qu’environ deux cents sur les cinq ou six cents sermons prononcés, car Bossuet ne les considérait pas comme des œuvres littéraires dignes d'être imprimées. C'est à la fin du XVIIIème siècle que certains sermons furent conservés, grâce au travail de Dom Deforis. Cependant, ce ne sont en réalité que des brouillons, alourdis par les ratures et les variantes, et qui ne nous offrent qu'une idée approximative de sa prédication.

Les panégyriques:

Le panégyrique consiste à faire l'éloge d'un saint pour en montrer les vertus à imiter. Le plus connu est le Panégyrique de Saint Paul (1659).

Les oraisons funèbres:

Commandée par la mort d'un grand personnage, l'oraison funèbre est un genre très solennel. Celles d'Henriette de France en 1669, d'Henriette d'Angleterre en 1670, et celle du Grand Condé en 1687 sont les plus célèbres. Evocation du défunt, leçon de grandeur morale composent ces discours.

Dans ses Oraisons funèbres, il fait sentir avec ampleur et musicalité le néant des grandeurs humaines. Il prononça l'oraison funèbre d'Henriette de France, reine d'Angleterre puis neuf mois plus tard celle de sa fille, Madame, Henriette-Anne d'Angleterre dont l'oraison funèbre "...Madame se meurt, Madame est morte..." est la plus fameuse, et de Marie-Thérèse d'Autriche. Les oraisons funèbres ne sont qu'au nombre de douze ; ce sont des chefs-d'œuvre d'éloquence qui sont sans modèle depuis l'Antiquité.

Les six oraisons

Le premier discours du recueil est l'Oraison funèbre de la reine d'Angleterre, prononcée en 1669, au couvent des Visitandines de Chaillot. L'exorde : "Celui qui règne dans les cieux et de qui relèvent tous les empires, etc.," est resté célèbre par sa magnificence ; les pages suivantes, où l'orateur découvre l'étendue de son sujet et la force des enseignements qu'il se propose d'en tirer : le récit de la fuite de la reine, le portrait de Cromwell, le tableau des luttes politiques et religieuses de l'Angleterre comptent - à juste titre - parmi les modèles de notre langue.

L'Oraison funèbre de Madame Henriette d'Angleterre, prononcée à Saint-Denis en 1670, est plus pathétique que la précédente. Bossuet avait assisté la mourante à ses derniers moments, peut-être avait-il pénétré les causes de cette mort mystérieuse. L'émotion dont l'âme de l'orateur est remplie éclate dès les premiers mots de l'exorde, qui est un rapprochement naturel avec l'oraison funèbre de la mère d'Henriette, prononcée neuf mois auparavant en présence de celle-ci : "J'étais donc encore destiné à rendre ce devoir funèbre.." et dans ces mots qui la terminent : "Mais, après tout ce que nous venons de voir, la santé n'est qu'un nom, la vie n'est qu'un songe, la gloire n'est qu'une apparence, etc." L'éloquence de la douleur a rarement trouvé des accents plus pénétrants que ces paroles qui firent éclater en sanglots tout l'auditoire : "Ô nuit désastreuse ! ô nuit effroyable, où retentit comme un éclat de tonnerre cette étonnante nouvelle : Madame se meurt ! Madame est morte !" Plus loin, l'émotion semble prendre le ton d'une mélancolique élégie : "Madame a passé du matin au soir ainsi que l'herbe des champs. Le matin, elle fleurissait, avec quelles grâces, vous le savez ; le soir, nous la vîmes séchée !"

L'Oraison funèbre de Marie-Thérèse d'Autriche, reine de France, prononcée à Saint-Denis en 1683, a une moins grande valeur. Le panégyrique de l'insignifiante femme de Louis XIV n'offrait qu'un texte bien peu fécond ; l'orateur s'est rejeté sur la piété, la vertu, le dévouement, la modestie de la feue reine et autres lieux communs plus propres à l'amplification qu'aux grands mouvements d'éloquence.

L'Oraison funèbre d'Anne de Gonzague, princesse Palatine, prononcée en 1685 donne un tel démenti à tout ce qu'on sait du personnage, que les vices inhérents à ce genre de discours peuvent y être touchés du doigt. Comme tout le monde savait que la religion avait été le moindre de ses soucis, l'orateur est obligé de raconter un songe mystérieux qui avait décidé sa conversion et à la suite duquel il suppose qu'elle termina sa vie dans la pratique de la plus sincère piété. Ce thème fournit à Bossuet, comme toujours, les plus solides arguments pour l'enseignement religieux ; mais ce discours est moins un panégyrique qu'un éloquent sermon.

L'Oraison funèbre de Michel Le Tellier (1636), personnage qui avait eu le triste honneur de signer de sa main mourante la révocation de l'édit de Nantes, a fourni à Bossuet l'occasion de glorifier un des plus grands crimes d'État dont l'histoire fasse mention. "Publions ce miracle de nos jours, s'écrie-t-il, épanchons nos cœurs sur la piété de Louis ; poussons jusqu'au ciel nos acclamations, et disons à ce nouveau Constantin, à ce nouveau Théodose, à ce nouveau Marcien, à ce nouveau Charlemagne, ce que les six cent trente Pères dirent autrefois dans le concile de Chalcédoine : "Vous avez affermi la foi, vous avez exterminé les hérétiques ; c'est le digne ouvrage de votre règne, c'en est le propre caractère. Par vous, l'hérésie n'est plus : Dieu seul a pu faire cette merveille."

Du reste, Bossuet n'est pas resté, au-dessous de lui-même dans cette oraison funèbre. On y remarque le portrait du cardinal de Retz, digne pendant de celui de Cromwell. La péroraison est un chef-d'œuvre ; c'est là que se trouve ce trait : "Dormez votre sommeil, grands de la terre, et demeurez dans votre poussière."

Enfin, l'Oraison funèbre du prince de Condé, la dernière et la plus justement admirée, fut prononcée, en 1687, dans l'église Notre-Dame de Paris. Comme dans toutes les autres, Bossuet subordonne le récit des faits à l'enthousiasme d'une vérité religieuse. L'héroïsme n'est rien sans la piété : commander aux hommes n'est qu'une illusion si l'on n'est pas soumis à Dieu. Telle est la thèse que soutient et que développe l'orateur. C'est ainsi qu'après avoir passé en revue les principaux exploits de son héros, il arrive au moment où toute cette gloire s'évanouit devant la mort, devant ce tombeau "orné de figures qui.semblent pleurer, fragiles images d'une douleur que le temps emporte avec tout le reste." On doit surtout louer la péroraison, où l'orateur appelle devant le tribunal de Dieu tous les âges et toutes les conditions, venant lui-même, à la suite de tant de générations, mêler à ce deuil religieux "les restes d'une voix qui tombe et d'une ardeur qui s'éteint."

On trouve dans quelques éditions, à la suite de ces Oraisons funèbres, le sermon prononcé par Bossuet à la prise de voile de Mlle de La Vallière. Bossuet avait encore composé deux autres oraisons funèbres : celle du Père Bourgoing, général de l'Oratoire, en et celle d'Anne d'Autriche en 1667 ; mais elles n'ont pas été imprimées.

Critique des oraisons funèbres

L'oraison funèbre, telle que l'avait conçue Bossuet et telle que son génie l'exécuta, n'a jamais été refaite depuis. C'était l'éloquence exprimant les méditations les plus élevées de la philosophie chrétienne sur la vanité des grandeurs humaines, sur les arrêts de la Providence planant au-dessus des peuples et des rois, des événements et des révolutions d'empires ; donnant à la douleur un caractère solennel et sacré, la sanctifiant par la résignation et la consolant par l'espérance de la vie éternelle.

Il y aurait, toutefois, quelques objections à faire.
Les entraînements du panégyrique conduisaient l'orateur à ériger en types de vertu des personnages souvent fort éloignés de cet idéal. Il donnait, il est vrai, sous leur nom, de belles leçons de morale religieuse : mais dans un tel système, que devient la vérité historique ? N'y a-t-il pas là un travail analogue à celui que les rhéteurs grecs faisaient subir à certains personnages (purement mythiques d'ailleurs), et dont ils faisaient des types de convention pour leurs amplifications de morale et de philosophie ?

En outre, la plupart de ces éloges funèbres aboutissaient invariablement à l'éloge du maître, représenté comme le plus grand des guerriers et des administrateurs, le plus magnanime des princes, le plus pieux, le plus sage, le plus juste de tous les hommes.

Cette préoccupation de courtisan se retrouve, on le sait, dans un grand nombre des ouvrages de Bossuet. Cette parole foudroyante et superbe savait admirablement s'adoucir pour flatter les puissants. Ceci, d'ailleurs, s'accorde avec la théorie officielle et consacrée de l'Église, que toute puissance vient de Dieu.

( Azadunifr )

Le prédicateur

Bossuet joua un grand rôle de prédicateur et de directeur de l'assemblée du clergé de France. Dans l'assemblée du clergé de 1682, à l'occasion des démêlés entre le roi et le pape, il fut l'auteur de la déclaration sur les libertés de l'Église gallicane en 1682, qui fixait les limites du pouvoir du Pape, et rédigea les Quatre articles de 1682 qui sont demeurés une loi de l'état et qui ont donné lieu à de vives discussions ; le pape en fut très irrité et les fit brûler.
Bossuet Jacques-Bénigne. Discours sur l'histoire universelle. ; 1681.
Ouvrage de Bossuet (1627-1704) publié à Paris en 1681. C'est un cours d'
histoire générale qui fut écrit uniquement pour l' éducation du Dauphin. Fondé
sur la Révélation, il embrasse toute la suite des temps qui se sont écoulés
depuis la création du monde jusqu'à l'empereur Charlemagne. Il se divise en
trois parties: le première s'intitule "Les époques"; la seconde, "La suite de
la religion" et la troisième, "Les Empires". Dans la première, l'auteur
s'attache à résumer dans l'ordre chronologique les principaux événements dont
le monde fut alors le théâtre. Dans la seconde, il aborde la religion
chrétienne: exaltant sa marche progressive, il montre comment, préparée par
Moïse, elle aboutit au triomphe de l' Eglise. Dans la dernière, il étudie les
empires de l' antiquité: les causes de leur grandeur et de leur décadence,
leur lente destruction mutuelle, leur unification enfin par les Romains
-laquelle devait faciliter la diffusion de l' Evangile. Comme on peut s'en
rendre compte, Bossuet considère tout du seul point de vue de l'action de la
Providence. Tous les événements qu'il évoque, il les explique par le dessein
qu'avait le Créateur d'assurer le triomphe du christianisme. Aujourd'hui,
certes, une telle conception de l'histoire ne laisse pas de nous mettre en
défiance. Chez Bossuet, l'historien cède trop souvent le pas au théologien. Il
n'empêche que le "Discours sur l'histoire universelle" fait grand honneur à
son auteur, dans la mesure même où il nous permet d'admirer les incroyables
ressources de son génie. Il ne s'agit pas seulement de ce style plein d'
antithèses, qui fait de lui le plus grand de nos prosateurs. Mais du fond même
de l'ouvrage: la richesse de l' information n'a d'égale que l'ampleur de la
conception. Qu'on y ajoute la sûreté de l'analyse. D'où il suit que, mis à
part l'objectif et les moyens, Bossuet se révèle ici le précurseur de
Montesquieu.

Évêque de Meaux

En 1681, lorsque l'éducation du Dauphin fut achevée, il fut nommé évêque de Meaux (d'où cette périphrase, "l'Aigle de Meaux") et se livra dès lors aux soins de l'épiscopat, fit de fréquentes prédications, et lutta, en tant que théologien, contre les protestants. Il rédigea le célèbre Catéchisme de Meaux (1687) et composa pour des religieuses de son diocèse les Méditations sur l'Evangile et les Elévations sur les Mystères.

Les ouvrages polémiques:

Il a toujours cultivé la controverse avec les protestants. En 1688, il écrit l'Histoire des variations des Eglises protestantes. En 1694, il fait paraître des Maximes et réflexions sur la comédie, où il condamne le théâtre qui déprave les moeurs. En 1698, il fait paraître sa Relation sur le quiétisme. L'année suivante, le Pape condamne cette doctrine.

L'éloquence sacrée est devenue aujourd'hui un genre oublié. Mais Bossuet garde un intérêt littéraire. Que l'on soit catholique ou non, on reste frappé par la limpidité des raisonnements, l'argumentation serrée et surtout la pureté de la langue. Les effets sonores, l'émotion des oraisons funèbres peuvent encore nous toucher. Les images expressives et vigoureuses frappent encore notre imagination par leur poésie.

Bossuet Jacques-Bénigne. Histoire des variations des Eglises protestantes. ;
1688.

Oeuvre célèbre de Jacques-Bénigne Bossuet (1627-1704), publiée en 1688. Depuis
le début de son apostolat, une des principales préoccupations de Bossuet avait
été la séparation des églises chrétiennes. Disciple de saint Vincent de Paul,
il voyait dans les Protestants, non des ennemis à combattre, mais des frères
séparés à ramener à l' unité. Dès ses premières discussions avec des ministres
protestants, il avait compris que le principal obstacle à une entente était
une méconnaissance complète de la doctrine de l'adversaire: l'un et l'autre
parti se jugeaient sur les légendes enfantées par la passion religieuse. Un
des premiers travaux avait été l' "Exposition de la doctrine de l' église
catholique" (1671, où il dépouillait cette doctrine des croyances erronées et
des pratiques abusives qui lui étaient attribuées par les Protestants. Onze
ans plus tard, en 1682, il publiait les "Conférences" qu'il avait eues avec le
célèbre théologien, le ministre Claude. Enfin, en 1688, paraissait l'
"Histoire des Variations", Bossuet avait démontré la nécessité d'adhérer à une
Eglise qui soit une. Certains Protestants, effrayés par l" anarchie qui
régnait parmi les églises protestantes, en convenaient, mais il prétendaient
que cette Eglise ne pouvait être l' Eglise catholique, car elle avait changé
et n'était plus l' Eglise de Jésus-Christ. Dans le "Traité de la communion
sous les deux espèces" (1682). Bossuet tâcha de réfuter les thèses du ministre
Jurieu, qui prétendait que l' Eglise avait varié dans l' administration de l'
Eucharistie. Avec l' "Histoire des variations", il élève le débat: les
Protestants reconnaissent eux-mêmes que L' Eglise primitive a eu autrefois le
dépôt de la vérité. Si elle avait changé, elle serait tombée dans l'erreur,
mais elle est infaillible dans son interprétation de l' Ecriture, puisque, si
elle ne l'était pas, nous aurions autant d'opinions diverses que de docteurs.
C'est ce qui est advenu aux Réformés: incapables, malgré leurs synodes et
leurs décrets, d'établir une Eglise. Bossuet s'appuie sur une documentation
historique très sûre, qu'il fît rassembler par ses secrétaires ou rassembla
lui-même, et son information directe est à peu près complète, sauf en ce qui
concerne la Réforme en Angleterre et l'histoire des Vaudois. Toutefois, on
peut lui reprocher de voir, dans la Réforme, un égarement de conscience plus
qu'une révolution dans le domaine de l'esprit et une époque de l'histoire de
l'humanité. Il explique le mouvement de la Réforme par les caractères des
différents Réformateurs: d'où la vivacité des portraits de Luther, de Calvin,
de Mélanchthon qu'il peint avec leurs énormes défauts, leur violence, leur
intransigeance, mais aussi avec leur énergie spirituelle et la vigueur de leur
esprit. Il souligne naturellement au passage les côtés tout humains de leurs
personnalités et leur dénie toute inspiration divine. L'oeuvre traite
longuement des débuts de la Réforme en Allemagne, des luttes de Luther, de ses
rapports avec Zwingli, en appuyant sur le rapide éparpillement des confessions
et des sectes, et sur les agitations qui naquirent presque aussitôt de cette
diversité. Bossuet passe ensuite au schisme d' Angleterre, dont il ne manque
pas de signaler le caractère tout politique. Puis viennent les chapitres
consacrés à la lutte des Réformés contre l'Empereur, et à Calvin, qui commence
une nouvelle propagande et organise une nouvelle dissidence dans les pays
mêmes qui avaient déjà été secoués par les troubles de la Réforme luthérienne,
en France, en Angleterre, en Allemagne et en Suisse.
L' Histoire des Variations" entend surtout montrer aux Protestants qu'ils
n'ont pas bien compris l'esprit de l' Eglise. Elle se pose moins comme une
oeuvre polémique que comme une mise au point impartiale: aussi évite-t-elle
soigneusement le ton agressif et les attaques directes, de telle façon qu'on
ne puisse soupçonner la bonne foi de l'auteur, qui est d'ailleurs entière.
L'oeuvre eut un immense succès et des réfutations parurent aussitôt après sa
parution. Les uns, Basnage et Burnet, écrivirent une "Histoire de la Réforme",
où ils contestaient un grand nombre de points de détail: Bossuet leur répondit
par la "Défense de l'histoire des Variations" (1691). Le ministre Jurieu prit
une attitude plus habile. Au lieu de contester les "variations", il affirma
qu'elles étaient une conséquence du libre examen, et donc bienfaisantes en
tant que telles. Cette réponse fit rebondir la controverse et, de 1689 à 1691,
Bossuet publia les "Six avertissements aux Protestants sur les lettres du
ministre Jurieu contre l'histoire des Variations". Bossuet, malgré son zèle
ardent, apparaît dans ces oeuvres comme le plus libéral des catholiques; et
les Protestants qui, malgré la Révocation de l' Edit de Nantes, que Bossuet
avait cependant approuvée , relatent encore partisans de la réunion des
Eglises, poursuivirent la discussion avec; en particulier Leibniz avec qui
l'évèque de Meaux entretint, pendant quelque temps, une correspondance. Le
style de l' Histoire des variations" a, tantôt la majesté de celui du
"Discours sur l' Histoire universelle", tantôt un ton plus familier quand il
évoque la personnalité des Réformateurs, mais il est toujours conduit par une
dialectique admirable.

La lutte contre le quiétisme

Il se trouva par là en lutte avec Fénelon, qui penchait vers le quiétisme : il poursuivit son adversaire à la fois auprès du roi, qui disgracia et exila l'évêque de Cambrai, et auprès du pape, qui condamna les Maximes des Saints où il soutenait la doctrine de l'amour de Dieu pour lui-même, sans aucun mélange de cette crainte que les théologiens appellent servile

Bossuet Jacques-Bénigne. Défense de la Tradition des Saints Pères. ; 1763

Ouvrage de Bossuet (1627-1704) écrit en 1702 et publié après sa mort à
Amsterdam en 1763, pour combattre l' oratorien Richard Simon qui, avec des
arguments contraires à la tradition, avait rédigé une "Histoire critique de l'
Ancien Testament", puis une "Histoire critique des principaux commentateurs du
Nouveau Testament" (1692). Bossuet se déchaîne contre cet ouvrage comme il
s'était déchaîné contre le précédant. Comprenant que la libre recherche est
dangereuse pour la solidité de la foi et du dogme, il dénonce le rationalisme
impie et mène une polémique des plus âpres par son tour doctrinaire, dû
peut-être à ce qu'il avait conscience de son insuffisante préparation
historique concernant les textes étudiés et les diverses discussions
philologiques relatives aux passages controversés.

Bossuet Jacques-Bénigne. Instructions sur les états d' oraison. ; 1697

Oeuvre de Bossuet (1627-1704), publiée en 1697. Poursuivant sa lutte contre le
quiétisme (théorie qui visait à orienter la religion vers la simple
contemplation, le célèbre évêque de Meaux était parvenu à faire signer par
Fénelon et Madame Guyon (les principaux inspirateurs de ce mouvement) un
formulaire qui tendait à remettre en valeur les pratiques de la piété et du
culte. Par les "Instructions", il donne aux fidèles diverses précisions
relatives au dogme, afin de leur éviter toute incertitude et toute querelle
tant en ce qui concerne la morale que l'interprétation des Ecritures.
Strictement orthodoxe, Bossuet combat, en fidèle soldat, pour l' unité de l'
Eglise. Au-delà des tendances mystiques, dangereusement liées à une expérience
personnelle (ses posthumes "Méditations sur l' Evangile" indiquent amplement
que dans son attitude de croyant et de directeur de conscience, la passion
n'est cependant pas absente), il cherche à consolider les bases du
catholicisme, telles qu'elles avaient été établies au concile de Trente: l'
unité dans la masse des fidèles et les principes de l'interprétation de
l'Ecriture Sainte réservés au magistère de l'Eglise, ainsi que la validité
ferme et inébranlable de la foi traditionnelle. Fénelon venait d'être nommé
archevêque de Cambrai, ayant eu connaissance du manuscrit de Bossuet, fit
immédiatement imprimer son "Explication des maximes des saints". Cette oeuvre,
qui répétait les principes quiétistes, devait s'opposer à celle de l'évêque de
Meaux. La polémique reprit avec beaucoup de vigueur pour aboutir à la
"Relation sur le quiétisme" de Bossuet et à la condamnation de Fénelon par le
Consistoire.

( Azadunifr )

Ces principales oeuvres

• Oraison funèbre de Henriette Marie de France, reine de la Grande-Bretagne (1669)
• Oraison funèbre de Henriette-Anne d’Angleterre, duchesse d’Orléans (1670)
• Exposition de la doctrine de l’Église catholique (1671)
• Traité de la connaissance de Dieu et de soi-même (1741)
• Discours sur l’Histoire universelle (1681)
• Traité de la communion sous les deux espèces (1682)
• Oraison funèbre de Marie-Thérèse d’Autriche infante d’Espagne, reine de France et de Navarre (1683)
• Oraison funèbre de Très-Haute, et Très-Puissante princesse Anne de Gonzague de Clèves, princesse palatine (1685)
• Oraison funèbre de Très-Haut, et Très-Puissant prince Louis de Bourbon, prince de Condé (1687)
• Histoire des variations des Églises protestantes (1688)
• L’Apocalypse avec une explication par messire Jacques-Benigne Bossuet (1689)
• Défense de la Tradition et des saints Pères (1693)
• Maximes et réflexions sur la comédie (1694)
• Relation sur le quiétisme (1697)
• La Politique tirée de l’Écriture sainte (1709)
• Traité de la concupiscence (1731)
• Lettres Publication posthume (1753)

( Azadunifr )

0 Comments:

Post a Comment

<< Home